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Histoire : François Marie Jacques Frizac (1772-1865)

Pour lui, le service public est plus important que son propre intérêt

François Marie Jacques Frizac, fils de J-Jacques Frizac, maître en chirurgie, est né à Toulouse le 12 février 1772.
Après ses études  à Toulouse où il obtient en 1791, le titre maître es-arts de l’université , il intègre en 1793 l’armée des Pyrénées en tant qu’officier de santé sous les ordres de Larrey(1). Il exerce, dans les ambulances et aux avant-postes, une périlleuse mission.
Il enseigne ensuite de 1799 à 1802 à l’école centrale du département du Tarn, où il est titulaire de la chaire d’histoire naturelle.  
Mais la suppression de cette chaire associée à des drames familiaux, l’amène à voyager en Allemagne, Angleterre et en Italie.
De 1808 à 1814 il est chef de la secrétairerie du grand-duché de Florence(2) notamment chargé du dépôt de mendicité.
En 1814, Louis XVIII prenant connaissance de son ouvrage : « Tableau descriptif, historique et politique de tous les départements de l’Empire français – 1808 », le nomme conseiller de préfecture à Toulouse en 1830. Il occupe même pendant un mois les fonctions de préfet.
Mais en 1841, suite à des troubles occasionnés par des opérations de recensement(3), il est brutalement destitué.  
Frizac est sans fortune ; il se trouve aux prises avec le besoin. Au travers de ses différents voyages, il a constitué une riche collection de minéraux et de  végétaux.
« Et ici, dit son biographe Florentin Ducos, il faut admirer le patriotisme de cet excellent toulousain. Il avait conçu le dessein, qu’il a exécuté plus tard par son testament, de donner à sa ville natale cette belle collection dont on lui offrait une somme très considérable, 80.000 francs, assure-t-on. Eh bien, malgré tout ce que sa position avait de précaire, il résista aux offres qui lui étaient faites, et, pour doter son berceau de ce trésor inestimable, il ne craignit pas de se condamner à la pauvreté. Il trouva, fort heureusement, un asile auprès de son neveu Charles Lassus, directeur des Forges de Decazeville, en attendant que l'autorité municipale lui confiât l'emploi de bibliothécaire de la ville. Le petit traitement qui en résulta, joint aux 860 frs de retraite qu’une ordonnance royale avait fini par lui concéder suffirent aux humbles besoins de François Frizac».
Continuant ses soins à la vaste collection destinée à la ville, il poursuit ainsi sa modeste existence qui se prolonge jusqu’en 1864.  Il a alors 93 ans.

Galerie de minéralogie Frizac et Lassus du musée, photo. : Augustin Pujol - coll. muséum, MHNT.PHa.1824.15.006photo. : Augustin Pujol - coll. muséum, MHNT.PHa.1824.15.006


Frizac a publié deux ouvrages, l’un sur les Prisons de Toulouse, l’autre sur les Hôpitaux, traduit un livre anglais, "Idées de bien public", communiqué des travaux remarquables à l’Académie des Sciences.
Le Conseil Municipal du 5 mai 1862 accepte la donation de sa collection de minéralogie, géologie, paléontologie et botanique et décide, selon le vœu de Frizac, de donner son nom associé à celui de son neveu, à la galerie abritant sa collection dans le muséum en projet. Lors de la création du Muséum en 1865, la « Salle Frizac et Lassus » est consacrée à la géologie générale et à la minéralogie.
En 1866, le Chemin du Busca prend le nom d’Avenue Frizac.
Laurent

Sources :
• Comité des travaux historiques et scientifiques ( cths.fr), les toulousain dans l’histoire , sous la direction de Philippe Wolff (édition privat)
• Damien GARRIGUES archiviste-bibliothécaire des Toulousains de Toulouse - Bulletin municipal - avril 1938 (AMT-PO1/1938/4)
• AUTA 5ème série n° 28 – oct 2021

(1) Jean-Dominique LARREY ( né à Baudéon en 1766 et mort à Lyon en 1842), fut chirurgien militaire sous Napoléon Bonaparte. Il le suivit dans toutes ses campagnes de l’expédition d’Egypte à Waterloo. Il fut reconnu par ses interventions sur les champs de bataille et contribua à l’évolution de la chirurgie.
(2) Le grand duché de Florence est un ancien état européen. Créé en 1568, il disparaît en 1801 suite à sa transformation en royaume d’Etrurie, par Napoléon Bonaparte, pour réapparaître ensuite en 1809  à la demande d’Elisa Bonaparte, sa sœur, qui en devient d’ailleurs grande duchesse. Ce royaume disparaît en 1859 après avoir été renversé par une émeute populaire pro-italienne et anti-autrichienne.
(3) Voir article : "Juillet 1841 : les émeutes enflamment Toulouse"  page 10

Juillet 1841 : les émeutes enflamment Toulouse

Que ce soit hier ou aujourd'hui, la fiscalité est toujours au cœur du vieux conflit opposant les communautés locales à l'État.
En août 1840,  Jean-Georges Humann,  ministre des Finances du gouvernement Soult, veut s'attaquer à l'énorme déficit du budget de l'État.
Augmenter les impôts lui paraît socialement dangereux, il choisit une autre solution qui s’avérera encore pire.

Le décompte des portes et fenêtres

Il décide de faire appliquer dans toute sa rigueur le prélèvement de la patente et de la taxe sur les portes et fenêtres. Le but : assujettir à l'impôt nombre de constructions récentes qui y échappaient.
Auparavant, c'étaient les agents municipaux qui comptaient les ouvertures, dorénavant, ce seront les agents du fisc. L'État se substitue ainsi, dans le contrôle, aux autorités municipales.
Les mairies le prennent très mal et favoriseront objectivement des émeutes un peu partout en France.

Déjà, des fake-news

Immédiatement des rumeurs apparaissent.  tandis que les contribuables les mieux informés redoutent une augmentation incontrôlée de la ponction fiscale, les habitants des villages situés à l'écart des principaux axes de communication sont persuadés que les agents des impôts ont reçu l'ordre de procéder à un inventaire du linge, du mobilier et des femmes enceintes (pour ne mentionner que les principales variantes de la rumeur), cet inventaire devant servir à établir une nouvelle taxe.
« Ils vont nous taxer sur nos draps et nos chemises » peut-on lire sur  les murs.

La tradition de lutte antifiscale du Midi

Le Nord reste à l'écart des troubles mais dans le triangle Bordeaux-Montpellier-Perpignan,  les agents du fisc se heurtent à une vive opposition de la part des contribuables. Toulouse est à l'épicentre du soulèvement dans le Sud-Ouest (entre le 4 et le 14 juillet).
Dans la ville rose, tout commence par une valse de préfets. Le Préfet de la Haute-Garonne, Joseph Floret, est destitué et remplacé par Jacques Antoine Mahul. Le premier était adoré, le second en fera les frais.
La foule s’amasse devant la préfecture pour conspuer  Mahul puis va sous les fenêtres de l’appartement de Floret pour lui offrir une aubade.

Des morts et des blessés

Des manifestations s'organisent dans divers quartiers de la ville et le 17 juillet près de 8000 habitants, encadrés et renforcés par des gardes nationaux, dressent des barricades dans le centre... Le 9ème régiment de Chasseurs à cheval intervient et les refoule violemment. Le « feu sur l'homme » est ordonné. Une fusillade qui fera de nombreux morts et blessés.
Les émeutes continuent, l'armée doit faire venir des troupes supplémentaires d'Auch et de Bayonne.

L'habile Monsieur Gasc

Le préfet Mahul est aux abois, il ne sait quelles décisions prendre. C'est à ce moment qu'interviendra un ancien adjoint au maire, l'avocat Jean Gasc.
Le politique homme de loi persuadera le préfet de confier la sécurité de la ville à la Garde Nationale . Il se gardera bien de lui dire que de nombreux éléments de cette Garde avaient déjà rejoint les émeutiers.
Le lendemain la Garde nationale passe du côté de l’émeute, l’affolement gagne le Capitole, le maire, monsieur Perpessac, démissionne ainsi que le conseil municipal :  Gasc et ses amis les remplacent dans l’enthousiasme de tous les émeutiers qui venaient de prendre le contrôle de la ville.

Toulouse en état de siège

Pour Paris, la coupe est pleine. Duval, « commissaire extraordinaire du roi » arrive, destitue Mahul, nomme un nouveau général et fait occuper toutes les grandes places par d'importantes forces militaires, souvent armées de canons à mitraille. Ordre est donné de charger si les émeutiers se révèlent trop menaçants.
Partout les groupes d'émeutiers sont dispersés.
Cette situation durera jusqu'à fin août. Le calme revient peu à peu. La plupart des régiments quittent la ville.
Les mois passèrent et la cour d’assises de la Haute- Garonne jugea les chefs des émeutiers qui furent condamnés à de lourdes peines de prison. Parmi ceux-ci se trouvait l’avocat Gasc .

Michel

Sources :
• AUTA N°533 -février 1988
• Un épisode de l'histoire de la ville de Toulouse, accompagné de pièces justificatives. Troubles de juillet 1841, par Perrin-Paviot -Septembre 1841 -  BNF 8-LB51-3480

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