Rencontre insolite entre un personnage de BD et un artiste juif assassiné par les nazis

Rencontre insolite entre un personnage de BD et un artiste juif assassiné par les nazis

Depuis le 6 décembre, le Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation propose une exposition  déroutante . Déroutante parce qu'elle réussit à mêler fiction artistique et réalisme dramatique.

Imaginez : Spirou, un personnage de papier, de bande dessinée, un jeune groom belge, qui rencontre Félix Nussbaum et sa femme Pelka, artistes juifs qui seront arrêtés par la Gestapo déportés et assassinés à Auschwitz en 1944.

En 1938, la maison d'éditions belge Dupuy, crée un hebdomadaire qu'elle baptisera Spirou, du nom de son jeune héros, groom dans un hôtel bruxellois . De nombreux dessinateurs se succéderont pour animer les aventures du jeune héros . Parmi eux, Emile Bravo.

Son rédacteur en chef, Georges Evrard dit « Jean Doisy » lui fait une curieuse demande

-  « dessine moi une histoire qui raconte l'invasion allemande avec Spirou en personnage principal... »

En fait , Jean Doisy est un membre actif de la résistance belge. Ce qu'il souhaite, c'est faire connaître au grand public l'histoire vraie de la Seconde Guerre mondiale.

Notre dessinateur, Emile Bravo, se met au travail et produit rapidement un premier album « L'espoir malgré tout » qui raconte l’invasion de la Belgique par les nazis sous les yeux ébahis du jeune Spirou.

L'oeuvre dessinée remporte un énorme succès à tel point que l'éditeur demande de couvrir toute la période de la guerre en ancrant son œuvre dans trois réalités historiques, l'Occupation, la Résistance et la Shoah.

Emile Bravo réalisera quatre tomes au total.

L'association pour la mémoire de la Shoah, enthousiasmée, propose aux Editions Dupuy un partenariat pour réaliser un exposition « Spirou dans la mémoire de la Shoah ». L'objectif est de pallier la disparition irrémédiable des témoins directs de ces tragiques évènements.

Cette exposition explore les faits historiques et les sources sur lesquelles s’est appuyé Émile Bravo pour bâtir son propos. Elle permet aussi de découvrir le peintre allemand Felix Nussbaum dont l’œuvre est à lire sous l’angle d’une allégorie de la condition des Juifs en Belgique entre 1940 et 1944.

La rencontre fictive entre Spirou et le peintre Felix Nussbaum et sa femme Felka, entraîne le personnage de bande dessinée dans la tourmente de la Shoah. Il découvre l’internement des ressortissants allemands dans les camps d’internement français où ils rejoignent les Républicains espagnols de la Retirada dont le père d’Emile Bravo.

L'exposition a d'abord été présentée au Mémorial de la Shoah à Paris .

Destinée à être itinérante, c'est Toulouse qui est choisie pour premier lieu en Région. Elle est installée au Musée de la Résistance et de la Déportation,  52 allée des Demoiselles.

Pourquoi Toulouse ? Quel rapport entre les belges , Spirou et la ville rose ? Tout simplement l'arrivée massive de réfugiés belges renvoyés par Pétain vers le sud de la France. Nombreux seront ceux qui se fixeront à Toulouse où existe encore actuellement une importante communauté belge.

Le Musée toulousain a réussi à enrichir l'exposition parisienne avec des documents inédits qui éclairent le contexte local de l'époque.

L'exposition « Spirou  dans la tourmente de la Shoah » sera présentée jusqu'au 2 mars au Musée de la Résistance et de la Déportation.

Michel