6 Avril 2018
En entrant dans l’église, nous nous trouvons dans une sorte de narthex sous la tribune supportée par des colonnes de marbre rouge. De là, nous apercevons toute la nef voûtée d’arêtes et dans son prolongement, le chœur et le sanctuaire couverts par une voûte en berceau plein cintre. Ce changement de voûte marque l’endroit où se terminait la nef des fidèles et où commençait le domaine des religieux.
Le sanctuaire actuel était occupé par la sacristie et le chœur des religieux se trouvait sur une tribune, de plain-pied avec les cellules des moines, surélevée par rapport à la nef.
Un mur séparait les religieux des fidèles. L’autel de la nef se trouvait contre ce mur et les frères Carmes pouvaient venir prier individuellement, jour et nuit, grâce à deux galeries grillagées que l’on remarque au-dessus de la porte de la sacristie et au-dessus du couloir qui lui fait face. Ces oratoires existent toujours, mais non visitables.
Après avoir contemplé l’ensemble, nous avançons jusqu’au chœur. Le mur primitif a été abattu et le sanctuaire agrandi fut établi sur le lieu où se trouvait l’ancienne sacristie.
A disparu aussi la tribune des religieux et à sa place nous voyons un hémicycle en galerie porté par quatre colonnes de marbre rouge semblables à celles de l’entrée. Au-dessus, figure en gypseries une représentation de « la Gloire » et en son centre le triangle, symbole de la Trinité, avec, en lettres hébraïques, le nom de Yahvé laissant passer la lumière du jour.
Sur cette galerie, existe une chapelle, à laquelle on accède par un escalier partant du couloir qui mène au clocher. Il est en mauvais état et non accessible au public. Cette chapelle était initialement dédiée à Notre-Dame du Mont Carmel. L’autel Louis XVI, en bois doré, avait été exécuté pour la chapelle du château de St Elix par le sculpteur François LUCAS, mort en 1813.
Au-dessous de la galerie et derrière le tabernacle, nous admirons un beau Christ en bois sculpté, datant du début du XVIIe siècle, par conséquent contemporain de l’église.
Au fond du sanctuaire, de chaque côté du tabernacle, nous voyons deux statues en bois doré : celle de gauche représente saint Louis Bertrand et celle de droite sainte Rose de Lima, réalisées pour un retable du couvent de Ste Catherine de Sienne. Elles sont l’œuvre de Thibaud MAISTRIER, sculpteur formé dans l’esprit traditionnel des ateliers toulousains du 17e siècle.
Saint Louis Bertrand (1526-1581) était un missionnaire espagnol de l’ordre des dominicains qui évangélisa les indiens d’Amérique de 1562 à 1569. Isabelle de Florès dite Rose de Lima (1586-1617), canonisée en 1671, est la première sainte du Nouveau Monde.
Toujours dans le sanctuaire, des stalles en noyer garnissent les murs latéraux du chœur. Les quatre premières en partant de la nef sont ornées et paraissent plus anciennes. Toutes datent du XIXe siècle.
Au-dessus de la stalle curiale est représentée l’image du Bon Pasteur. A côté des portillons donnant sur la nef, on voit l’image sculptée de saint Exupère (côté sacristie) et saint Michel (côté couloir du clocher). Ces bas reliefs sont dus au ciseau de MAURETTE (1878).
Au-dessus des stalles, nous pouvons admirer une partie importante des toiles de DESPAX (1709-1773) qui ornaient autrefois le plafond de la chapelle des Pénitents Gris, appelées la série des Prophètes :
A gauche, Daniel dans la fosse aux lions – la Sibylle Erythrée –Triomphe de la Croix – Moïse et les tables de la loi – le prophète Elie sur le char de Feu.
A droite, le prophète Habacuq emporté par les cheveux – le prophète Isaïe dont l’ange purifie les lèvres avec un charbon ardent – la Sibylle Sambethia – Jean Baptiste prêchant dans le désert – le prophète Jonas debout sur le rivage.
Le chœur fut transformé en 1807, au moment où l’édifice devint église paroissiale, par l’architecte Jacques-Pascal VIREBENT (1746-1831). Le même architecte a certainement dessiné la tribune de l’orgue avec ses colonnes et la chaire réalisée par COMBY en 1808.
Le maître-autel d’esprit Louis XVI a vu séparer la table du tabernacle, afin de permettre la célébration des messes face au peuple suivant les orientations du Concile Vatican II.
Les peintures de la voûte du chœur datent de 1838, elles sont l’œuvre du peintre Giovani Soglia CERONI (1779-1856), l’un des meilleurs décorateurs de cette époque. Il traita plus sobrement les murs de la nef.
En se retournant vers la nef, la merveilleuse et rare décoration de gypseries a été, semble-t-il, totalement conservée, bien qu’une petite partie soit cachée par la tribune de l’orgue. Les programmes les plus riches, avec des anges monumentaux, sont ceux qui avoisinent le chœur.
La tribune, érigée en 1807, porte un bel orgue reconstruit en 1885 par la maison Théodore PUGET et fils. Nous distinguons les quatre tourelles et, un peu moins bien, les trois plates-faces du buffet. Des angelots musiciens et des têtes d’anges ornent cet ensemble, avec aussi, quelques pots de fleurs et des frises de feuillage.
Cet orgue comporte 27 jeux répartis sur trois claviers manuels de 56 notes et un pédalier de 27 notes, c’est-à-dire environ 1500 tuyaux. De l’avis des spécialistes, les jeux d’anche sont de très belle qualité sonore.
Sur les parois de la nef, chaque travée comportait un grand tableau dans un cadre de gypse. Saisis à la Révolution, ces tableaux ont été dispersés.
A gauche, la nouvelle sacristie a remplacé la chapelle de l’Enfant Jésus dont nous n’avons conservé aucune trace de la décoration.
Sur le même côté, un tableau d’un peintre anonyme, consacré à la mort d’un saint, sans doute St Joseph car le saint est entouré de la Vierge et de Jésus.
Ensuite, nous trouvons la chapelle dédiée à St Joseph. On y voit, de chaque côté de l’autel, des médaillons de style Louis XVI, représentant un homme et une femme. A gauche, une toile dépeint l’apothéose de saint Saturnin, fondateur de l’Eglise de Toulouse, vers 250. Elle serait signée, pour certains, par Jean-Pierre RIVALZ (1718-1785), pour d’autres par DESPAX.
Entre les deux chapelles, tout en continuant vers la sortie, une toile du XVIIe siècle attribuée à André LEBRE (1629-1700) en raison des anges blonds et frisés qui sont habituels sur ses tableaux. Elle évoque l’Annonciation et proviendrait de l’église Saint Rome.
Ensuite la chapelle de Notre-Dame de la Salette, témoin de la piété populaire du XIXe siècle, se distingue par sa décoration en rupture avec celle de l’ensemble du site.
Après cette chapelle, voici le seul tableau ramené à sa vraie place après la Révolution. Il s’agit de la classique représentation de la Transverbération de sainte Thérèse d’Avila d’Antonio VERRIO (1639-1707) : sa présence est bien naturelle dans une église construite par les Carmes réformés.
Revenons à l’entrée du chœur à droite par la chaire de Jacques Pascal VIREBENT, puis la chapelle de Notre Dame de la Pitié, la Piéta est en terre cuite polychrome. Entre les pilastres du retable, Les Saintes Femmes, peinture murale de Gabriel BERINGUIER (1843-1913).
Toujours en redescendant la nef, entre les deux chapelles, une sobre évocation de la mort de sainte Monique, la mère de saint Augustin. Ce tableau de Jean-Baptiste DESPAX provient du couvent des Augustins.
Aussitôt après : la chapelle saint Roch. Au dessus de l’autel, un tableau nous montre saint Roch au milieu des malades ; il est signé par le toulousain Joseph LATUS et daté de 1862, et à droite un autre tableau concerne St Jean de la Croix vénérant la Vierge Marie. A gauche de la chapelle saint Roch, une toile représente le Mariage mystique de Sainte Catherine de Sienne, attribuée à Joseph ROQUES (1757-1847).
Ensuite la chapelle des Fonts baptismaux, fermée par une grille de fer forgé. Nous y admirons le groupe de pierre figurant Jean Baptiste baptisant Jésus. C’est aussi le thème du tableau à droite (auteurs non connus).
Une fois sortis dans la cour, nous nous retournons pour admirer cette belle façade du XVIIe siècle qui a été restaurée, avec le groupe de pierre sculpté représentant saint Joseph avec l’Enfant Jésus, œuvre de Gervais DROUET (1665).
Plus haut, une rose, puis une corniche horizontale à denticules, couronnée par un fronton courbe. Encadrements des portes, niche et rose, sont en brique et pierre alternées selon la mode du temps.
En regardant l’édifice depuis les allées Jules Guesde, nous apercevons à sa gauche le clocher octogonal, tout modeste, avec ses étages sans retrait et sa petite flèche couverte d’ardoises qui cache un carillon de 14 cloches. Il remplace le clocher détruit en 1794.
Nous aurons une pensée pour ces religieux si fervents qui, il y a près de quatre siècles, ont édifié cette église pour y prier le Seigneur. Avec la chapelle des carmélites, où l’on ne célèbre plus le culte, St Exupère est la seule église de style baroque à Toulouse, témoin d’une des plus belles créations de l’art religieux du 17ème siècle.
Depuis septembre 1993, Mgr André COLLINI, archevêque de TOULOUSE, a confié l’animation de la paroisse aux Augustins de l’Assomption, appelés plus couramment les Pères Assomptionnistes.